Cette décision vient compléter, dans le domaine des énergies renouvelables, les arrêts rendus le 3 juin 2020 (n°425395), au sujet de l’exploitation d’une carrière de marbre calcaire blanc par la société La Provençale, (cf. Post blog du 9 juin 2020), ainsi que celui du 25 mai 2018 relatif au centre commercial Val Tolosa du 25 mai 2018 (n°413267).
En l’espèce, le Conseil d’Etat était saisi d’un pourvoi de la société pour la protection des paysages et de l’esthétiques de la France contre un arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes rejetant le recours des requérants à l’encontre de la dérogation accordée à une société pour l’exploitation d’un parc éolien en forêt de Lanouée.
Sur le premier temps de l’examen de la légalité de la dérogation, qui consiste à vérifier si la réalisation du projet est motivée par la poursuite d’une raison impérative d'intérêt public majeur (la « RIIPM »), le Conseil d’Etat s’assure, par un contrôle de la qualification des faits, que le projet permet bien à la fois de contribuer à la réalisation des objectifs nationaux de développement de l’énergie renouvelable fixés par la loi mais également d’accroître la production d’électricité renouvelable en Bretagne, après avoir relevé « le caractère fragile de l’approvisionnement électrique » de cette région.
Il ne faut pas en déduire que les « petits projets » ne peuvent répondre à une RIIPM mais que la contribution du projet aux objectifs nationaux ou régionaux de développement du renouvelable doit être suffisamment justifiée par le porteur du projet pour permettre d’identifier une telle RIIPM.
Le Conseil d’Etat confirme cette appréciation par une décision rendue le même jour pour un projet de centrale hydroélectrique dans le Tarn. Dans cette espèce, pour confirmer l’arrêt de la Cour administrative de Bordeaux qui a écarté la RIIPM après avoir estimé que la contribution de la centrale au développement des ENR tant au niveau régional que national n’était pas établi, il précise que le dossier ne permettait pas de constater que le projet « quoique de petite taille, s'inscrivait dans un plan plus large de développement de l'énergie renouvelable et notamment de l'hydroélectricité à laquelle il apporterait une contribution utile bien que modeste » (cf. n°432158).
Le second temps de l’appréciation de la légalité d’une dérogation espèces protégées consiste à vérifier (i) qu’il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et (ii) que cette dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.
En l’occurrence, dans l’arrêt commenté, le Conseil d’Etat, qui n’était saisi que de la première de ces deux conditions, s’en remet à l’appréciation souveraine de la Cour qui a considéré que la société avait étudié plusieurs implantations possibles pour le parc éolien avant de retenir l’emplacement du projet.
Enfin, c’est par un même contrôle limité à la dénaturation qu’il considère que la Cour n’a pas commis d’erreur de droit en estimant que la dérogation avait été régulièrement octroyée, dès lors que l'opération projetée, consistant en la construction et l'exploitation d'un parc éolien, « ne nécessitait pas l'indication, au demeurant quasiment impossible à recueillir, du nombre et du sexe des spécimens concernés par la dérogation sollicitée » (cf. CAA Nantes 5 mars 2019, 17NT02791).