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Implantation d’un parc éolien dans le champ d’un radar et impartialité de l’expert : précisions du Conseil d’Etat

Le Conseil d’Etat vient de rendre un arrêt sur la question de la compatibilité des éoliennes avec la présence de radars météorologiques.

Dans cette affaire, suite à un recours introduit par la société EDP Renewable France, le Tribunal administratif d’Amiens avait annulé le refus opposé par le préfet de la Somme à ladite société concernant une demande de permis de construire ayant pour objet la construction d’un parc composé de six éoliennes situé dans le champ d’action d’un radar météorologique.

Saisie par le Ministre de l’écologie, la Cour administrative d’appel de Douai avait ordonné une expertise afin de déterminer l’impact du projet sur le fonctionnement du radar.

Relevant suite à l’expertise que « les dysfonctionnements induits par les éoliennes (étaient) de nature à porter atteinte à la sécurité publique au sens de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme en raison de la perturbation importante de la détection des phénomènes météorologiques dangereux qu’elles entraînent sans réelle possibilité de neutralisation de leurs effets », la Cour avait annulé le jugement du Tribunal administratif et rejeté les conclusions aux fins d’annulation du refus du Préfet présentées par la société EDP Renewable France (CAA Douai 15 juin 2010, Ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, n°09DA01149).

Devant le Conseil d’Etat, deux moyens principaux étaient soulevés (lien vers l'arrêt).

L’impartialité de l’expert :

Tout d’abord, la requérante reprochait à l’expert d’avoir tenu des propos hostiles aux entreprises du secteur éolien et que l’expertise était par conséquent entachée d’impartialité.

Le Conseil d’Etat écarte le moyen et relève que « la requérante ne saurait invoquer pour la première fois en cassation le moyen, qui n’est pas d’ordre public, tiré de ce que des déclarations de l’expert rendues publiques antérieurement à l’arrêt attaqué auraient été de nature à susciter un doute légitime quat à son impartialité dans l’accomplissement de sa mission d’expertise ».

Une telle position du Conseil d’Etat est assez étonnante.

En effet, depuis l’arrêt M. Petit (visé dans l’analyse de l’arrêt commenté) le Conseil d’Etat estime que le moyen tiré de l’irrégularité de la composition d’une formation de jugement peut être invoqué à toute étape de la procédure, y compris devant le juge de cassation (CE sect., 12 octobre 2009, n°311641).

On aurait pu imaginer que le Conseil d’Etat applique à l’impartialité de l’expert la même jurisprudence libérale. On voit mal ce qui différencie fondamentalement l'impartialité de l'expert de celle du juge.

Par ailleurs, la rédaction retenue par le Conseil d’Etat nous semble quelque peu restrictive.

En effet, le Conseil d’Etat précise que les déclarations prises en considération sont celles qui ont été « rendues publiques ».

Or, si l'on peut comprendre que lorsque le requérant a connaissance de propos partiaux de l'expert il soit tenu de soulever le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure en temps utile à défaut de quoi ce moyen serait irrecevable, on voit en revanche difficilement comment il pourrait lui être opposé la même irrecevabilité alors même qu'il n'a eu connaissance des propos tenus par l'expert que postérieurement à sa désignation, voire postérieurement à l'expertise. Certes, une telle hypothèse nécessiterait de vérifier au cas par cas le moment auquel la partie a eu connaissance des propos, ce qui ne semble a priori pas évident. Toutefois, elle aurait pour mérite d'éviter de favoriser une éventuelle dissimulation par l'expert d'une attitude partiale antérieure à sa désignation.

Il conviendrait sans doute d’attendre des précisions du juge administratif sur l’application de cette jurisprudence.

 

L’atteinte à la sécurité publique liée à la présence d’un radar météorologique :

Bien que porteuse d'enjeux forts pour le secteur éolien, la réponse du Conseil d’Etat sur la question de la compatibilité des radars avec la présence d’éoliennes est relativement décevante en ce sens que le Conseil d’Etat se contente purement et simplement de valider le raisonnement de la Cour.

Il affirme en effet que « la cour a porté sur les faits qui lui étaient soumis et qu’elle n’a pas dénaturés une appréciation souveraine en jugeant, par une décision suffisamment motivée et exempte d’erreur de droit, qu’il ressortait des pièces du dossier que les dysfonctionnements induits par les éoliennes sont de nature à porter atteinte à la sécurité publique au sens de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme en raison de la perturbation importante de la détection des phénomènes météorologiques dangereux qu’elles entraînent, sans réelle possibilité de neutralisation de leurs effets et, par suite, que le préfet de la Somme n’avait pas commis d’erreur d’appréciation en refusant de délivrer le permis de construire les installation litigieuses ».

Cet arrêt ne sanctionne pas de facto les projets se situant dans le champ d'action d'un radar. Il conviendra dès lors d'examiner au cas par cas les effets perturbateurs des parcs éoliens sur les radars.

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