De nouvelles ambitions pour la transition énergétique
La loi énergie-climat rehausse en premier lieu les ambitions de la France en matière énergétique (chapitre Ier). Le législateur a symboliquement inscrit « l’urgence écologique et climatique » à l’article L. 100-4 du code de l’énergie.
Au même article, l’objectif de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre (GES) entre 1990 et 2050 est remplacé par celui d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 en divisant les émissions de GES par six par rapport à 1990. A cet effet, l’article 12 de la loi fixe un plafond d’émissions applicable, à compter du 1er janvier 2022, aux installations de production d’électricité à partir de combustibles fossiles situées sur le territoire métropolitain continental et émettant plus de 0,55 tonnes d’équivalents dioxyde de carbone par mégawattheure (C. énergie, art. L. 311-5-3 II). Cette disposition entraînera la fermeture des dernières centrales à charbon en métropole.
Les objectifs énergétiques intermédiaires pour 2050, le développement de l’énergie hydraulique, de l’éolien en mer et de l’hydrogène bas-carbone sont également mis en avant.
Pour compenser cette hausse des ambitions en matière d’énergies fossiles, le gouvernement a repoussé à 2035 (contre 2025 avant la loi) l’objectif de porter à 50% la part du nucléaire dans la production d’électricité. Dans cette optique, l’article 62 prévoit un rehaussement du plafond de l’Accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) d’EDF, qui passe de 100 à 150 térawattheures par an à compter du 1er janvier 2020.
Pérennisation du Haut conseil pour le climat
L’article 10 de la loi donne un fondement législatif au Haut Conseil pour le climat, créé en novembre 2018 (C. envir., art. L. 132-4 et L. 132-5), défini comme un « organisme indépendant (…) placé auprès du Premier ministre », composé de 12 membres nommés par décret pour cinq ans et doté d’un rôle essentiellement consultatif.
Le Haut conseil peut être saisi de sa propre initiative, par le Gouvernement ou par les Présidents de l’Assemblée nationale, du Sénat et du CESE pour rendre un avis sur un projet de loi, une proposition de loi ou une question entrant dans son domaine d’expertise (C. envir., art. L. 132-5).
Réforme de l’autorité environnementale
L’article 31 de la loi apporte des évolutions attendues de longue date en matière d’évaluation environnementale, prenant en compte les exigences communautaires, l’autorité environnementale n’est désormais plus en charge de l’évaluation au cas par cas (C. envir., art. L122-1 II). Le V bis du même article prévoit désormais que « l’autorité en charge de l’examen au cas par cas et l’autorité environnementale ne doivent pas se trouver dans une position donnant lieu à un conflit d’intérêt ».
Il faudra toutefois attendre un décret en Conseil d’État pour désigner les entités qui incarneront chacune de ces deux autorités, mais aussi combler le vide juridique né de la jurisprudence du Conseil d’Etat depuis près de deux ans quant à la "double casquette" du préfet de département et du préfet de région en matière d'autorité environnementale (v. en ce sens notre post du 23 août 2019).
Assouplissement des règles d’urbanisme pour les installations de production d’énergie renouvelable
Le Gouvernement a entendu favoriser l’implantation d’infrastructures de production d’énergie renouvelable. Ainsi, la loi énergie-climat instaure un certain nombre de dérogations aux règles d’urbanisme :
– L’article 35 permet au préfet de déroger aux prescriptions du PPRT pour permettre l’implantation d’installations de production d’énergie renouvelable (c. envir., art. L. 515-16-1) ;
– L’article 44 permet de déroger à l’interdiction d’implanter des constructions dans une bande de cent mètres le long des autoroutes pour certaines infrastructures de production d’énergie solaire (C. urb., art. L.111-7, 5°) ;
– L’article 45 étend le champ de la dérogation prévue à l’article L.111-16 du Code de l’urbanisme aux dispositifs de production d’énergie renouvelable installées sur les ombrières des aires de stationnement ;
– Enfin, l’article 48 prévoit de déroger aux règles des PLU relatives à l’emprise au sol, à la hauteur à l’implantation et à l’aspect extérieur des constructions afin d’autoriser l’installation d’ombrières dotées d’installations de production d’énergie renouvelable sur les aires de stationnement (C. urb., art. L. 152-5).
Développement des énergies renouvelables
De nombreuses dispositions viennent favoriser le développement des énergies renouvelables sur le territoire.
Ainsi, l’article 33 prévoit la création de « contrats d’expérimentation » applicables aux éoliennes et au biogaz (Sections 5 et 7 du chapitre IV du titre Ier du livre III du Code de l’énergie). Ainsi, l’autorité administrative pourra recourir à un appel à projets pour sélectionner des solutions innovantes dans ces secteurs. Les candidats désignés pourront bénéficier d’un contrat d’achat pour l’électricité produite conclu avec EdF.
L’article 47 impose quant à lui, pour les constructions mentionnées au II de l’article L.111-18-1 du code de l’urbanisme ainsi que pour les constructions commerciales créant plus de 1000 mètres carrés d’emprise au sol, l’obligation de prévoir un procédé de production d’énergie renouvelable ou un système de végétalisation de la toiture du bâtiment.
Transposition du paquet « une énergie propre pour tous les Européens »
L’article 39 prévoit la transposition par ordonnances du paquet « énergie propre » vaste recueil de textes sur la politique énergétique de l’Union Européenne.
L’article 40 institue à cet effet les « communautés d’énergie renouvelable », entités juridiques autonomes composées essentiellement de personnes physiques, PME, et collectivités territoriales, ayant pour objet la production et le partage d’énergie renouvelable au sein de la communauté (C. énergie, art. L. 211-3-2). Si un décret est attendu afin de préciser les modalités concrètes de leur fonctionnement, il faudra toutefois veiller à l’articulation de cette nouvelle entité avec les « communautés énergétiques citoyennes », également prévues par le paquet « énergie propre » mais non encore transposées en droit interne.
Enfin, le régime de l’autoconsommation est également étoffé de deux nouvelles dispositions : l’une ouvrant la possibilité pour les tiers à l’opération de détenir ou gérer l’installation de l’autoproducteur (C. énergie, art. L. 315-1) et l’autre définissant la notion d’autoconsommation collective étendue (C. énergie, art. L. 315-2).