1. Une mutation de l’autorisation d’aménagement commercial
1.1. Le permis de construire valant désormais autorisation d’aménagement commercial
La principale innovation réalisée par la loi du 18 juin 2014 en matière d’aménagement commercial consiste à fusionner l’autorisation d’exploitation commerciale (« AEC ») avec le permis de construire.
Ainsi, pour les projets soumis à ces deux autorisations, le permis de construire tiendra désormais lieu de l’AEC dès lors que la demande de permis aura fait l’objet d’un avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial (« CDAC ») ou, le cas échéant, de la Commission nationale d’aménagement commercial (« CNAC »).
Pour ces projets, la CDAC ne délivre donc plus d’autorisation et se contente d’émettre un avis conforme. Un recours subsiste devant la CNAC contre cet avis, ce recours pouvant être intenté dans le délai d’un mois par une liste de personnes mentionnées à l’article L. 752-17 du code de commerce, à savoir le demandeur, le préfet, tout membre de la CDAC ou tout professionnel ou association de professionnels dont l’activité, exercée dans la limite de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d’être affectée par le projet. Ce recours, qui donne lieu à un avis de la CNAC se substituant à celui de la CDAC, devient un préalable obligatoire au recours contentieux contre le permis de construire ou le refus de permis de construire.
Un régime contentieux spécifique est aménagé pour ce permis de construire valant AEC.
Les cours administratives d’appel (« CAA ») deviennent compétentes en premier et dernier ressort pour connaître des litiges relatifs à ce permis.
Par ailleurs, le cadre du litige est circonscrit en fonction des requérants :
– les personnes listées à l’article L. 752-17 du code de commerce ne peuvent contester à cette occasion le permis qu’en tant qu’il tient lieu de l’AEC, les moyens relatifs à l’autorisation de construire étant irrecevables ;
– la situation est inversée lorsque d’autres requérants contestent ce permis, lesquels ne peuvent demander l’annulation du permis qu’en tant qu’il vaut autorisation de construire.
Pour les projets non soumis à permis de construire, la loi « Pinel » maintient une AEC autonome, délivrée par la CDAC, mais qui ne pourra être contestée devant la CNAC que par les personnes listées à l’article L. 752-17 du code de commerce, cette saisine constituant un préalable obligatoire à un recours contentieux devant la CAA, également compétente en premier et dernier ressort.
1.2. L’institution de nouveaux critères pour l’AEC ou l’avis préalable au permis de construire
La loi « Pinel » procède également à une révision des critères d’examen des projets d’aménagement commercial par la CDAC.
Dans les deux catégories préexistantes, relatives à l’aménagement du territoire et le développement durable, plusieurs critères sont précisés et de nouveaux sont ajoutés, comme par exemple « la consommation économe de l’espace, notamment en termes de stationnement » ou encore « l’insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l’utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ». En outre, une nouvelle catégorie est ajoutée, relative à la protection des consommateurs, comprenant des critères tels que la variété de l’offre proposée par le projet ou les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d’implantation du projet.
1.3. La création d’un document de planification en matière d’aménagement commercial, le DAAC
Du point de vue de la planification, il est prévue que la délivrance des AEC puisse être encadrée par un document d’aménagement artisanal et commercial (« DAAC »), pouvant être inséré dans le document d'orientation et d'objectifs (« DOO ») du schéma de cohérence territoriale (« SCoT »).
Ce DAAC :
– déterminera les conditions d’implantation d’équipements commerciaux d’une importance telle qu’ils seraient susceptibles d’avoir un impact significatif sur l’aménagement du territoire et le développement durable ;
– localisera les secteurs d’implantation périphériques ainsi que les centralités urbaines dans lesquels se posent des enjeux spécifiques du point de vue des objectifs du DOO permettant de prévoir des conditions d’implantation des équipements commerciaux spécifiques.
Afin d’inciter à la rédaction d’un tel document, la loi précise que l’annulation du DAAC ne compromet pas les autres documents du SCoT.
1.4. Des dispositions particulières à l’aménagement cinématographique
A noter, par ailleurs, que des modifications sont apportées au régime de l’aménagement cinématographique, avec notamment la création d’une procédure distincte de l’aménagement commercial, centrée autour de commissions départementales et d’une commission nationale de l’aménagement cinématographique, créées pour l’occasion et autonomes par rapport à la CDAC et de la CNAC.
2. Un assouplissement en matière d’occupation du domaine public
La loi « Pinel » apporte des dérogations, en faveur de certains commerces, aux principes selon lesquels l’autorisation d’occupation du domaine public est personnelle et ne peut être cédée.
2.1. Pour les fonds de commerce ou les fonds agricoles
La loi « Pinel » permet désormais au futur acquéreur d’un fonds de commerce ou d’un fonds agricole, de demander une autorisation d’occupation du domaine public par anticipation, pour l’exploitation de ce fonds, c’est à dire avant l’acquisition du fonds de commerce.
Par ailleurs, il est prévu, en cas de décès de l’exploitant d’un fonds de commerce, ou d’un fonds agricole, que ses ayants droit puissent bénéficier, sur demande, d’une autorisation d’occupation du domaine public identique à celle accordée à l’exploitant, pour la seule poursuite de l’exploitation du fonds, pendant 3 mois. Les ayants droit auront également la possibilité, s’ils ne poursuivent pas l’exploitation du fonds, de présenter une personne comme successeur à l’autorisation d’occupation du domaine public dans les 6 mois à compter du décès.
2.2. Pour les halles et marchés
Un droit de présentation d’un successeur est également prévu pour les titulaires d’une autorisation d’occupation au sein d’une halle ou d’un marché, en cas de cession de leurs fonds.
Ce droit de présentation est transmis à leurs ayants droit en cas de décès , pour une période limitée de 6 mois, au terme de laquelle ce droit devient caduc.
La réforme de l’aménagement commercial à proprement parler, relative à l’AEC et à la planification, n’entrera en vigueur qu’à une date qui sera fixée par un décret en Conseil d’Etat, au plus tard le 18 décembre 2014. Les autres dispositions sont entrées en vigueur le 20 juin dernier.