Dans cette affaire, les requérants avaient déposé une déclaration préalable portant sur l’édification d’une clôture. Le maire de la commune s’est opposé à cette déclaration préalable. Les requérants ont alors formé un recours pour excès de pouvoir contre la décision du maire qui a été rejeté par le tribunal administratif. Les requérants ont décidé de contester le jugement du tribunal administratif. Cette contestation a donné lieu à l’arrêt dont fait l’objet cet article.
Pour rappel, les règles relatives à la présentation de la demande d’une autorisation d’urbanisme ont connu des évolutions ces dernières années.
Sous l’ancien régime, la mise en œuvre de l’article R. 421-1-1 du code de l’urbanisme a conduit le juge administratif à faire application de la théorie dite du « propriétaire apparent ». Lorsque le pétitionnaire se déclarait propriétaire, l’administration ne rejetait le permis que dans l’hypothèse où il ressortait clairement du dossier que le pétitionnaire n’était pas le propriétaire. Lorsque le pétitionnaire n’était pas le propriétaire et disposait d’un titre, l’administration devait vérifier si le pétitionnaire produisait ce titre. En l’absence de ce titre, l’administration était tenue de rejeter le permis (CE 27 février 2008, Guérin, n°289945).
La réforme des autorisations d’urbanisme a modifié cette jurisprudence qui s’est avérée complexe.
Désormais, le pétitionnaire n’a pas à justifier de sa qualité. Il doit simplement joindre une attestation selon laquelle il entre dans les catégories de personnes habilitées à solliciter la délivrance d’une autorisation d’urbanisme (article R. 423-1 du code de l’urbanisme). Cette attestation ressort de la signature d’un certificat Cerfa par le pétitionnaire.
Le juge administratif a estimé que l’autorité compétente pour instruire la demande devait vérifier la seule présence de l’attestation dans la demande et non sa régularité (CE 15 février 2012, Quenesson, n° 333631). Elle n’a ainsi pas à exercer un examen de la qualité du pétitionnaire. Il n’en est autrement qu’en cas de fraude du demandeur.
Toutefois, la jurisprudence n’avait eu à connaître de la fraude que dans des situations limitées. Par exemple dans l’hypothèse où le pétitionnaire avait connaissance de l’opposition du propriétaire quant à la réalisation des travaux (CE 6 décembre 2013, n°354703).
Par son arrêt du 23 mars 2015, le Conseil Etat énonce alors, dans un considérant de principe, les modalités de contrôle de la qualité du pétitionnaire d’une autorisation d’urbanisme en cas de fraude.
Il déclare que « lorsque l’autorité saisie d’une déclaration préalable ou d’un permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d’informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu’implique l’article R. 423-1 du code de l’urbanisme, d’aucun droit à la déposer, il lui revient de s’opposer à la déclaration ou de refuser la demande de permis pour ce motif ».
En l’espèce, les juges du fond avaient considéré que le pétitionnaire n’avait pas qualité pour déposer une déclaration préalable en se fondant :
- sur le fait qu’une décision judiciaire rendue dans le cadre de l’action en bornage ne tranchait pas la question du fond mais déterminait seulement la délimitation matérielle
- et sur les motifs d’une décision judiciaire rendue dans le cadre d’une action en revendication de propriété, relatifs au tracé du chemin rural revendiqué par des voisins des requérants aux fins d’obtenir la reconnaissance d’une servitude par destination du père de famille en application de l’article 692 du code civil.
Le Conseil d’Etat censure ce jugement aux motifs que l’attestation prévue par l’article R. 431-35 du code de l’urbanisme est présente et que les requérants n’ont pas commis de fraude.
Réglant l’affaire au fond, il constate que l’édification de clôture est dispensée de toute formalité et que le plan local d’urbanisme n’imposait aucune formalité pour l’édification d’une clôture sur le terrain d’assiette projeté. En conséquence, il décide que le maire ne pouvait pas légalement s’opposer à la déclaration déposée par les requérants.