Rappel sur l’obligation de sécurité à laquelle est tenue l’employeur envers les salariés en forfait jours
Un salarié bénéficiant d’une convention de forfait en jours sur l’année a considéré que son employeur n’avait pas respecté son obligation de sécurité à son égard. Il invoque avoir alerté à plusieurs reprises son employeur sur sa charge de travail excessive et sur son état de souffrance psychologique.
La Cour d’appel a rejeté la demande du salarié considérant que l’employeur avait satisfait à son obligation de sécurité, ce dernier ayant immédiatement contacté un médecin du travail dès que cette situation avait été portée à sa connaissance.
La Cour de cassation a cependant censuré la Cour d’appel considérant qu’alerter le médecin du travail a posteriori ne suffisait pas à caractériser le respect par l’employeur de son obligation de sécurité.
La Cour rappelle ici que l’employeur doit « avoir pris les dispositions nécessaires de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail du salarié restaient raisonnables et assuraient une bonne répartition dans le temps du travail ». A défaut, il était redevable de dommages et intérêts à l’endroit du salarié au titre du préjudice subi par ce dernier.
Notre recommandation : L’employeur doit s’assurer – en amont – que le salarié bénéficiant d’une convention de forfait en jours sur l’année a une amplitude et une charge de travail raisonnables ne mettant pas en danger sa santé physique ou mentale. Une réaction a posteriori ne peut suffire.
Cass. Soc. 2 mars 2022, n°20-16.683
Le salarié en convention de forfait en jours sur l’année doit suivre l’organisation du travail déterminée par l’employeur
La Cour rappelle dans cet arrêt que le salarié bénéficiant d’une convention de forfait en jours sur l’année ne dispose pas d’une liberté totale dans la fixation de ses horaires de travail.
Même s’il dispose d’une réelle autonomie dans l’organisation de son emploi du temps pour l’exercice des responsabilités qui lui sont confiées, le salarié en convention de forfait doit respecter les contraintes liées à l’organisation du travail par l’employeur dans l’exercice de son pouvoir de direction.
Si dans cet arrêt, la Cour permet à l’employeur d’imposer à la salariée d’être présente sur le lieu de travail selon des demi-journée ou journée de travail fixes, c’est parce que : (i) d’une part, la salariée restait libre de ses horaires et pouvait organiser ses interventions dans cette clinique vétérinaire à sa guise, et (ii) d’autre part, la validité intrinsèque du forfait en jours était douteuse en l’espèce, la salariée étant totalement intégrée à l’organisation collective du travail.
En pratique, l’employeur ne peut pas imposer à un salarié en convention de forfait en jours sur l’année, ni une répartition détaillée de ses jours travaillés en fixant un calendrier hebdomadaire, mensuel ou annuel des jours de travail, ni des horaires quotidiens ou un nombre d’heures de travail par jour.
Pour autant, l’employeur est en droit, au titre de son pouvoir de direction, d’exiger la présence du salarié à certaines réunions et évènements professionnels.
Notre recommandation : L’employeur ne peut pas imposer un calendrier précis d’horaires et de jours de travail au salarié en forfait jours. Mais le salarié ne dispose pas non plus d’une liberté totale : il doit respecter les contraintes liées à l’organisation collective du travail fixées de l’employeur.
Cass. Soc. 2 février 2022, n°20-15.744
En l’absence d’accord des parties, le juge peut fixer la majoration applicable aux jours de repos auxquels le salarié a renoncé
Un salarié bénéficiant d’une convention de forfait en jours sur l’année a saisi le Conseil de prud’hommes d’une demande de rappels de salaire au titre d’une majoration de 25% des jours supplémentaires travaillés.
L’employeur avançait d’une part, qu’aucune convention écrite ne prévoyait cette possibilité de renonciation à des jours de repos et qu’en tout état de cause, le taux de la majoration applicable ne pouvait dépasser le taux minimum légal de 10%.
La Cour de cassation confirme la décision de la Cour d’appel faisant droit à la demande du salarié :
-elle considère que le paiement par l’employeur des « jours excédentaires » (hors majoration) établissait que les parties étaient convenues de la renonciation aux jours de repos correspondants ; et
-elle fixe unilatéralement, à défaut d’accord des parties, le taux de majoration à 25%, considérant ne pas être liée par le taux minimum légal de 10%.
La Cour de cassation revient donc sur un arrêt antérieur qui avait autorisé le juge à fixer le montant dû au salarié en l’absence d’accord entre les parties sur la contrepartie applicable en cas de renonciation à des jours de repos, par le biais de dommages et intérêts (Cass. Soc. 7 décembre 2010, n°09-42-626). Ainsi, la Cour, plutôt que de se placer sur le terrain des indemnités, rémunère directement le salarié pour le travail qu’il a accompli lors du dépassement des jours forfaitisés.
Notre recommandation : Lorsque le salarié renonce à des jours de repos prévus par une convention de forfait en jours sur l’année, le juge peut fixer unilatéralement la majoration applicable, même si les parties n’ont pas conclu d’accord écrit.
Cass. Soc. 26 janvier 2022, n°20-13.266
A retenir :
1. L’employeur doit s’assurer – en amont – que le salarié bénéficiant d’une convention de forfait en jours sur l’année a une amplitude et une charge de travail raisonnables ne mettant pas en danger sa santé physique ou mentale. Une réaction a posteriori ne peut suffire. 2. L’employeur ne peut pas imposer un calendrier précis d’horaires et de jours de travail au salarié en forfait jours. Mais le salarié ne dispose pas non plus d’une liberté totale : il doit respecter les contraintes liées à l’organisation collective du travail fixées de l’employeur. 3. Lorsque le salarié renonce à des jours de repos prévus par une convention de forfait en jours sur l’année, le juge peut fixer unilatéralement la majoration applicable, même si les parties n’ont pas conclu d’accord écrit. |