Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, une centrale d’achat entretenait des relations établies avec un de ses partenaires commerciaux, représentant 15% de son chiffre d’affaires et ce, depuis 2003. Au cours de l’année 2010, ce dernier avait toutefois cessé, du jour au lendemain, de s’approvisionner auprès de la centrale.
La centrale d’achat avait alors sollicité la réparation du préjudice qu’elle estimait avoir subi, sur le fondement de la rupture brutale de relations commerciales établies.
La Cour d’appel de Paris retenant le caractère brutal de la rupture et, partant, la responsabilité de la société à son origine, avait condamné l’auteur de la rupture au paiement de dommages et intérêts équivalents à la perte de marge brute qui aurait pu être réalisée pendant la durée d’un préavis raisonnable – établi ici à 6 mois -, si celui-ci avait été observé (CA Paris, Pôle 5, Ch. 5, 12 juin 2014, RG nº 12/19673).
L’auteur de la rupture contestait cependant dans son pourvoi la brutalité de la rupture, au motif que son partenaire commercial avait eu connaissance, par le biais d’un échange de correspondances intervenu près de deux ans avant la rupture, de sa volonté de mettre un terme à leur relation. La rupture était donc selon lui parfaitement prévisible et, de ce fait, ne pouvait être considérée comme brutale et fautive.
L’argument n’a pas prospéré devant la chambre commerciale : rejetant l’argument, la Cour de cassation a affirmé que la prévisibilité d’une rupture commerciale à venir ne suffit pas, en elle-même, à lui retirer tout caractère brutal.
Ainsi, seule une rupture qui résulterait d’un acte qui, cumulativement (i) manifeste l’intention du partenaire commercial de ne plus poursuivre les relations établies et (ii) fait courir un délai de préavis suffisant au regard des critères établis par les tribunaux, assurerait éventuellement à son auteur la garantie de ne pas voir sa responsabilité engagée pour rupture brutale.