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Rupture brutale des relations commerciales établies : La Cour de cassation invite les juges du fond à rechercher l’auteur véritable de la rupture

Par un important arrêt du 22 juin 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation considère que la tête d’un réseau de distribution peut voir sa responsabilité engagée sur le fondement de l’article L.442-1 II du Code de commerce lorsque les membres du réseau, formellement à l’origine de la rupture, ne disposent d’aucune autonomie de décision.

Cass. com., 22 juin 2022, n°21-14.230

En l’espèce

Dans cette affaire, un fournisseur reprochait à la tête d’un important réseau de distribution d’être à l’origine de la rupture des relations commerciales qu’il avait nouées avec les sociétés membres de ce réseau.

Pour rejeter le recours du fournisseur, la Cour d’appel a retenu que les membres du réseau, qui avaient notifié la rupture, devaient personnellement répondre de celle-ci dès lors qu’ils étaient exploités par des sociétés pourvues de personnalités juridiques autonomes et distinctes de la tête du réseau.

La question de droit posée à la Cour de cassation

La question posée à la Cour de cassation était donc celle de savoir si, et dans quelles conditions, la tête d’un réseau peut voir sa responsabilité engagée lorsque la rupture a été notifiée par les sociétés qui en sont membres, à la suite de la décision de cette tête.

Aux termes d’un arrêt du 5 juillet 2016, la Cour de cassation avait considéré qu’une société mère pouvait voir sa responsabilité engagée sur le fondement de l’article L.442-1 II du Code de commerce lorsque ses filiales, détenues à 100%, étaient dépourvues de tout pouvoir décisionnel (Cass. Com., 5 juillet 2016, n°14-27.030).

La Cour de cassation affine sa jurisprudence en la matière

L’arrêt du 22 juin 2022 reprend et affine cette solution en considérant que les sociétés membres d’un réseau de distribution qui notifient à leur fournisseur une rupture de leur relation commerciale ne peuvent voir leur responsabilité engagée à ce titre lorsqu’elles ne disposent d’aucune autonomie de décision quant au choix de leurs fournisseurs et de la poursuite de leur relation commerciale avec eux.

Mais la Cour de cassation va plus loin en précisant que cette solution s’applique quel que soit le statut de la société en cause et peu important qu’elle dispose d’une personnalité juridique distincte de celle de la tête du réseau.

L’autonomie juridique d’une société ne préjuge donc pas de son autonomie opérationnelle.

Les juges du fond sont alors invités à rechercher si la rupture est librement décidée par le cocontractant qui en est formellement à l’origine ou si elle lui est imposée par une société tierce au contrat, qui de son côté pourrait engager sa responsabilité au titre de l’article L.442-1 II du Code de commerce.

La Cour de cassation lève donc (prudemment) le voile de la personnalité morale pour rechercher la responsabilité du véritable auteur de la rupture qui a imposé sa décision aux membres de son réseau.

Cette décision doit être pleinement approuvée, et invite tous les plaideurs à s’interroger sur les véritables auteurs des ruptures de relations commerciales établies avant d’engager une action judiciaire.

Auteurs de cet article : Nicolas Contis et Matthieu Guignès avocats, société d’avocats Kalliopé

Contact : Kalliopé · Nicolas Contis · Avocat associé · ncontis@kalliope-law.com · 06 63 92 17 15

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